mercredi, mars 02, 2016

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Paris, le mercredi 2 mars 2016




« L’aller » et le « retour » des jihadistes


1)- L’objet de la réflexion
La réflexion qui suit porte sur la question bien précise et délimitée de la réponse de l’Etat français aux responsabilités prises par les français impliqués dans le parcours du terrorisme jihadiste.

1- Les faits
A l’égard des terroristes visés, l’Etat français :
a- ne prend en compte que les actions entreprises sur le sol de certains Etats, en l’espèce la France, voire l’Europe ;
b- occulte les actions commises sur le sol d’autres Etats, les Etats des « pays sources du Califat » en l’occurrence ;
c- ignore les justices de ces autres Etats.

La correction apportée par les Etats occidentaux à l’angle légal aveugle de leur action hors des frontières consiste :
a- à tuer les jihadistes, au moyen des forces spéciales ou des drones.
b- à se substituer à la justice des pays d’exercice premier de la criminalité jihadiste.

Ce qui pose de multiples questions juridiques internationales. Ce qui rend inopérantes ces procédures à l’avenir.

2- La proposition :
a- remplacer la prise en compte de la seule action nationale des terroristes visés par la prise en considération, juridiquement identique, de la totalité de leurs activités, l’intégralité de leur parcours ;
b- remplacer la solution du déni et du meurtre clandestin par la solution du droit.
c- reconnaitre la justice des Etats des « pays sources de califat ».

3- Plan du texte :
Chapitre 1 : La doctrine en cours, p. 2
Chapitre 2 : La doctrine à venir, p. 15

Chapitre 1 : La doctrine en cours

2)- Les qualités de ce parcours
1- Ce terrorisme a pour visée :
a- installer partout un califat, autrement dit de détruire le principe même de l’Etat, et de sa primauté, comme mode d’organisation social et politique ;
b- substituer à la primauté de l’Etat la primauté de l’administration religieuse ou charia.

2- Ce jihadisme procède par :
a- Le « départ » d’un Etat de nationalité des jihadistes, en l’espèce la France ;
b- « L’aller » vers un ou plusieurs Etats phagocytés par les jihadistes comme « pays sources du Califat » ;
c- La commission d’une activité criminelle vis-à-vis de l’Etat parasité par les organisations jihadistes ;
d- Le « retour » vers l’Etat national
e- La mise en place d’un réseau jihadiste de revenants ;
f- La commission ou non d’une activité militaire immédiate.

3- Ce qui est déterminant dans la criminalité jihadiste est :
a- La création d’une parasitose criminelle dans chaque Etat de séjour.
b- « L’aller-retour ».
C’est par les allers-retours que se forment les réseaux et que s’active la criminalité.


3)- La conception française de ce parcours
L’idéologie publique française est celle de la priorité accordée à la protection des droits de la personne du jihadiste par rapport à la défense de l’Etat :
a- Interdire le « départ » au titre de l’inconscience et de la protection du jihadiste. Celui-ci est considéré comme un inconscient dangereux pour lui-même avant de l’être pour les autres.
b- Considérer l’ « aller », le voyage, comme une contamination, intoxication, griserie, un traumatisme, selon l’image ou la comparaison retenues ;
c- Identifier le « retour » des jihadistes au retour de l’enfant prodigue ;
d- Pour ce « retour » : Organiser la déradicalisation, c’est à dire un sas de décontamination, dégrisement, désintoxication, soins post-traumatiques ;
e- Organiser la réinstallation du revenant dans la société ;
f- Ne pas juger les faits commis dans le pays de « l’aller », les « pays sources du Califat », sauf informations dûment certifiées.
g- dans ce dernier cas, se substituer à l’Etat du pays où ont été commis les faits certifiés en jugeant des faits en toute incompétence.  

4)- La réalité des qualités du parcours
Cette construction idéologique ne correspond pas aux faits :
1- La mécanique du jihad n’est pas celle d’un « aller » délirant qui se solderait par un « retour » conscient.
2- La mécanique du jihad est celle de :
a- La dynamique de l’aller-retour ;
b- La création d’une parasitose criminelle à chaque moment géographique du parcours.
c- La programmation de « l’aller-retour » du jihadiste est celle d’un dépôt de criminalité autonome dans divers lieux du parcours.
3- Le déni de la dynamique du parcours et de l’élan criminel acquis à chaque étape :
a- Fait de la France un lieu de repli des jihadistes.
Ayant participé, à leur place souvent minuscule, à l’installation d’un parasitage de l’Etat pris comme Etat « source du Califat », ils reviennent se refaire une santé et une sécurité en France.
b- Garantit aux jihadistes de pouvoir installer leur parasitose dans le pays de nationalité, ici la France.


4- La taxe française
Les jihadistes paient une taxe de sortie au moment du « départ » et une taxe d’entrée au moment du « retour ».
Cela prend la forme de : Prison, déradicalisation, preuves de réinsertions, disparition des préoccupations officielles.
Cette taxe les dédouane de leurs responsabilités à l’égard des Etats tiers.

5- Les déradicalisés
a- Il est symptomatique que les « déradicalisés » repentants que nous présente la télévision sont en djellaba et barbus pour les hommes et en niqab, le visage voilé, pour les femmes.

b- Les succès indéniables de cette politique fondée sur la protection des droits des martyrs inconscients s’appellent : MM. Chérif, Merah, Kouachi Saïd.
- M. Chérif a comparu libre à son procès parceque les autorités françaises ont estimé qu’un homme condamné à 15 ans de prison en Irak, ne présente aucun danger pour la France.
- MM. Merah et Kouachi Saïd sont tous deux sortis de la surveillance policière au titre du succès de leur réinsertion.

6- Le renversement
Il est à noter qu’en définitive les jihadistes obtiennent progressivement un certificat de martyr.
C’est parcequ’ils seraient martyrisés, discriminés, par les français que les jihadistes sont censés faire le jihad.
Il faut donc modifier la société française à leur avantage.

5)- Les présupposés
Cet accueil au pays du « retour » dans le déni des crimes commis dans les pays de « l’aller » repose sur la disqualification préalable des Etats de « l’aller ».    

Cette disqualification est auréolée d’une exigence droit-de-l’hommiste.

Selon cette pratique juridique, les Etats occidentaux, la France pour ce qui nous concerne, ne pourraient pas discuter des crimes commis sur le territoire d’Etats de « l’aller » en raison de la criminalité propre à ces Etats. Ces Etats seraient aussi criminels, voire plus, que ceux qui les combattent.
Ainsi, la France ne saurait entrer en contact avec la justice syrienne du fait de la criminalité du Président syrien.

De plus, ces Etats seraient incapables de présenter les garanties d’équitabilité d’un procès et de dignité de l’exécution d’une peine exigées par l’Union européenne et une kyrielle de Traités internationaux.

Or, les faits montrent que le nombrilisme, le repliement sur le précarré hexagonale, l’idéologie de la sanctuarisation, l’occidentalisation des légitimités judiciaires, le refus de discuter avec les justices concernées par les parcours jihadistes, ne proviennent pas de ces exigences de pureté et d’humanisme affichées.

6)- Trois cas
Nous allons examiner les modalités historiques d’installation de ce déni au travers de trois cas : MM. Chérif, Merah, Kouachi Saïd.  

1- M. Chérif

A- Les faits
Cf. : L’express
2003, il se radicalise, en même temps que les Kouachi.
La machine idéologique à blanchiment de criminalité est déjà en activité.
Sa mère parle de « lavage de cerveau ». Sa fiancée parle de « lobotomisation ». Il ne peut pas être tout simplement fasciste.
2004 : Damas, au titre d’étudiant, puis l’Irak, comme combattant.
Lisons le récit du journaliste de l’Express. Il est sidérant et exemplaire :
« Une fois la frontière franchie, à l'été 2004, Peter Chérif se retrouve sous les ordres du Jordanien Abou Moussab al-Zarkaoui, l'un des chefs les plus sanguinaires d'Al Qaeda
Peter Chérif, blessé à la jambe gauche et au visage par des éclats de mortier, est finalement capturé à Falloujah le 2 décembre 2004 lors de l'opération Phantom Fury puis incarcéré, dans le camp Bucca, l'immense centre pénitentiaire du sud irakien
"Là, il a reçu à deux reprises, en novembre 2005 et en juin 2006, la visite d'un représentant du consulat de France à Bagdad, relate aujourd'hui à L'Express son avocat Me Eric Plouvier
Il disait avoir été témoin et victime de sévices. il aurait par ailleurs été interrogé une quinzaine de fois." Un an plus tard, Chérif passe en jugement devant un tribunal irakien qui le condamne à quinze ans d'emprisonnement pour franchissement illégal de frontière. Voilà son horizon bouché. 
Mais un coup du sort lui permet de retrouver la liberté. Le 6 mars 2007, un commando d'une trentaine d'hommes attaque la prison de Badush (nord du pays, près de Mossoul), son nouveau lieu de détention. Avec lui s'évadent près de 150 prisonniers. Quarante sont repris mais pas lui. Peter Chérif parvient à rejoindre la Syrie toute proche. Libre à nouveau mais dans une nasse, avec les services syriens à ses trousses. Selon la DST, le jeune homme intègre un groupe terroriste, incitant les musulmans à rejoindre le djihad depuis le clavier de son ordinateur. Mais il juge alors plus prudent de signaler sa présence aux autorités françaises et de se rendre. Mieux vaut risquer une poignée d'années d'emprisonnement pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste" que de laisser sa peau dans une geôle syrienne. En février 2008, la DST le récupère en douceur à l'arrivée de l'avion de Damas, direction les locaux de la rue Nélaton, près des quais de Seine, où il est placé en garde à vue. 
Un mois plus tard, commence le procès de sept autres membres de la filière des Buttes-Chaumont. L'ami de Peter Chérif, Chérif Kouachi en fait partie mais écope d'une peine relativement légère (trois ans dont dix-huit mois avec sursis), les magistrats le considérant comme un personnage secondaire. 
Le cas de Peter Chérif a, lui, été disjoint, le temps pour le juge d'instruction de rassembler les éléments de preuves et à Me Eric Plouvier, son conseil, de préparer sa défense. Lors de sa comparution en janvier 2011, devant la 14e chambre correctionnelle, l'actualité s'est depuis longtemps détournée des djihadistes français en Irak. Leur chef, Zarkaoui n'a-t-il pas été tué par les Américains au cours d'un bombardement voilà cinq ans déjà? 
Malgré le parcours singulier de Peter Chérif, son procès ne déplace pas les foules. L'audience s'ouvre même dans une relative indifférence en janvier 2011. "Arlésienne" de ce dossier selon l'expression de la présidente du tribunal, l'islamiste radical comparaît libre après dix-sept mois passés en détention provisoire dans une prison française. Julie Brafman, la journaliste qui couvre le procès pour L'Express, le décrit comme "la pièce manquante, le maillon qui permettra de boucler le dossier dit de la filière du XIXe arrondissement".  
A la barre, comme bon nombre de djihadistes présumés, Peter Chérif se garde bien de justifier son engagement religieux radical. Il fait plutôt profil bas.
Il biaise. "J'ai une pratique très proche des textes. D'ailleurs, je me suis mis au sport, à la lecture, ce qui ravissait ma mère", concède-t-il seulement. L'Irak? "J'ai eu envie de voyager comme chacun à des passions [...] Je suis parti sur un coup de tête. Je suis parti car j'étais touché par la misère du peuple irakien. Je faisais partie de la révolte du peuple contre l'occupation." "C'est une période que j'essaie d'oublier", résume-t-il comme on chasse un mauvais souvenir. Il concède seulement avoir eu une Kalachnikov entre les mains. A l'entendre, son rôle se limitait à alimenter le lance-roquettes d'un combattant. 
Une rencontre au Yémen avec l'un des frères Kouachi?
Au dernier jour du procès, le prévenu juge plus prudent de ne pas se rendre à l'audience, sentant qu'une condamnation est inévitable. Le 10 mars 2011, il écope de cinq ans d'emprisonnement et d'un mandat d'arrêt. Il disparaît dans la nature. 
Peter Chérif réussit à quitter la France. »

B- Faits marquants de ce parcours :
a- M. Chérif est condamné à 15 ans de prison par un tribunal irakien. Celui-ci juge sous l’autorité et la protection des Etats-Unis.
b- En 2008, M. Bachar el Assad, Président de la République arabe de Syrie est invité au défilé du 14 juillet.
c- Rien de juridique ni de politique ne pouvait justifier que M. Chérif soit exfiltré, de la Syrie vers la France, et ne soit pas remis à la justice irakienne.  
d- La seule préoccupation de la justice française est « la filière du XIXe arrondissement ».
e- Les magistrats sont devant un homme condamné à 15 ans de prison par un tribunal irakien et ils le laissent en liberté provisoire avant et durant le procès. Tout ce qui les intéresse est un quartier de Paris.
f- L’Etat irakien est reconnu comme légitime par la France mais pour les fonctionnaires de l’Etat français, il n’existe pas.

2- M. Merah

A- Les faits
Wikipédia :
« Voyage au Pakistan
En août 2011, les autorités pakistanaises délivrent à Mohammed Merah un visa touristique d’un mois216. Il s’embarque à destination de Lahore le 19 août 2011217. Il racontera lui-même ainsi son séjour: « Quand je suis arrivé au Pakistan, comme d'hab je faisais le touriste, je visitais des monuments et tout pour être vu. Dès que je suis allé à Islamabad, je suis rentré dans une certaine mosquée et j'ai vu un homme dont j'avais entendu qu'il soutenait les talibans ouvertement et je savais que son fils ou ses enfants avaient été tués par des militaires pakistanais, donc je pouvais lui faire confiance. […] Il m'a ramené chez lui et de là, de là, il m'a envoyé chez un émir des talibans. Ça me paraissait un peu trop facile »182. Les spécialistes pensent que ce religieux qui servira d'intermédiaire est Abdul Aziz Ghazi, l’imam radical de la Mosquée rouge218. Les services de renseignements pakistanais (Inter-Services Intelligence, ISI) signalent à l'ambassade de France Mohammed Merah comme un candidat potentiel au djihad219. À Lahore, ce dernier est accompagné par un homme appartenant au Lashkar-e-Toiba, un groupe extrémiste pakistanais fondé dans les années 1980 par les services secrets, impliqué dans plusieurs attaques en Inde et en Afghanistan. Le jeune toulousain appelle sa mère à plusieurs reprises depuis les centres téléphoniques d'Anarkali, le vieux bazar. Il envoie également des e-mails depuis des endroits très en vue - une salle de classe du prestigieux collège Aitchison, un institut privé, ou encore le bureau d'un organisme délivrant des visas pour les pays anglophones. Il se rend ensuite à Kharian, une petite ville étroitement surveillée, car elle abrite une base militaire. Il y appelle sa mère depuis des magasins de téléphonie. Les 26 et 27 août 2011, son adresse Internet est activée à Sakhi Sarwar (en), une ville sous administration militaire, en raison de sa proximité avec un site nucléaire. Le 3 septembre 2011 il utilise sa messagerie mail à Islamabad220.
Entre le 4 et le 17 septembre environ, il se rend clandestinement dans l'ouest du pays, à Miranshah, un fief taliban du Waziristan près de la frontière avec l'Afghanistan221. La NSA, le service d'interception américain222, détecte début septembre 2011, l'activation à Miransha de deux de ses adresses internet223. Une fois à Miranshah, Merah est mis en relation avec Moez Garsallaoui, un islamiste radical tunisien époux de Malika El Aroud, veuve de l'un des meurtriers du commandant Massoud le 9 septembre 2001, qui sera liquidé par une frappe aérienne quelques mois plus tard221. Il est testé pendant dix jours pour vérifier qu’il n’est pas infiltré par les services occidentaux224 et reçoit dans un camp d'entraînement du Waziristan du Nord, aux côtés d'autres recrues européennes, une formation pendant deux jours au maniement des armes et au combat rapproché avec le Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP)219. Comme il refuse de manipuler les explosifs, Merah n'est pas entraîné en vue d'une action suicide car il n’a « pas l’âme d’un martyr » mais préfère « tuer et rester en vie »225,224. La DCRI recense l'activation de son adresse Internet le 9 octobre à Abbottabad, le 13 octobre à Lahore où il appelle les policiers de Toulouse pour leur signaler qu'il ne pourra pas se rendre à une convocation car il n'est pas en France220. Deux jours plus tard, il se trouve à Faisalabad. Après deux mois au Pakistan, le jeune islamiste doit écourter son séjour à la mi-octobre 2011, car il a contracté l'hépatite A226.
Retour en France
De retour en France le 19 octobre 2011221, il est hospitalisé à Toulouse où il refuse d'être soigné par des femmes227. Le 3 novembre, il rappelle les fonctionnaires de police pour les assurer qu'il viendra les voir dès sa sortie de l'hôpital220. Le 14 novembre 2011, il est interrogé pendant deux heures et demie sur ces voyages par le brigadier Hassan de l'antenne locale de la DCRI228,229 et par un officier de la sous-direction du contre-terrorisme, section « islam sunnite » descendu spécialement du siège de la Centrale de Levallois-Perret230. Il prétend avoir fait du tourisme et avoir recherché une épouse231,203. Fidèle à la stratégie de la « taqiya », l'art de la dissimulation et du camouflage face à l'« ennemi », Merah occulte le véritable but de son voyage jusque dans les zones tribales pakistanaises pour en rapporter son « permis de tuer »b 45. Comme l'explique son frère Abdelkader « Mohammed se faisait passer pour un touriste et c’est comme cela qu’il a trompé son monde. Il a réussi à faire passer une image de musulman pas sérieux, il faisait des petites conneries et a donné le change. C’était calculé »42. Cette tactique réussit à tromper les policiers qui notent dans leur compte rendu en date du 25 janvier 2012232 : « cette rencontre n'a pas permis de faire le lien entre Mohammed Merah et un éventuel réseau djihadiste »106. »

B- Résumé :
a- Les Services secrets pakistanais et américains signalent la présence de M. Merah et sa criminalité aux autorités françaises ou la recensent.
b- Les Services français suivent son parcours, notamment au Pakistan.
c- A son retour, il est interrogé aussi longtemps que nécessaire, de droit, par les Services français.
d- Ceux-ci avaient tous les moyens pour établir la criminalité de son parcours au Pakistan.


C- La raison de la liberté de M. Merah
Question :
Pourquoi rien n’a-t-il été fait ?
Réponse :
Parceque pour la seule chose qui intéresse l’Etat français est de savoir si M. Merah a des visées militaires en France.
En résumé ; à la question :
- êtes-vous revenu en France pour tuer des français et aller en prison à perpétuité ?
M. Merah exprime sa prise de conscience et sa déradicalisation en répondant sincèrement : non.
Il est donc laissé en liberté.
D’ailleurs les services constatent qu’il ne présente plus aucun danger.
Il est l’archétype de la déradicalisation réussie.
Comme Chérif.

3- Saïd Kouachi

A- Les faits
Wikipédia
« En 2011, Saïd reçoit un entraînement au combat et au maniement d'armes légères au Yémen.
C'est en 2012 qu'il se marie à Charleville-Mézières où son frère s'était marié en 2008.
Il était inscrit sur la liste noire des terroristes aux États-Unis depuis quelques années.
Repéré à cause de son voyage au Yémen via le Sultanat d'Oman, il fait l'objet entre 2011 et 2014, de quinze mois d’écoutes et de quatre mois de surveillance physique.
La CNCIS met fin aux écoutes téléphoniques en juin 2014 faute d’éléments probants en lien avec le terrorisme, les écoutes ayant uniquement révélé des allusions à un trafic de contrefaçons de vêtements et de chaussures de sport. »

B- Résumé
Les agents de l’Etat ne pouvaient rien ignorer. Ils n’ont pas voulu voir. Comme pour les autres.

7)- Questions
Qu’est-ce qui a permis :
a- A M. Chérif de quitter la France pour aller tuer ailleurs ;
b- A M. Merah de s’entrainer au Pakistan et de revenir sereinement tuer des français.
c- A M. Kouachi Saïd de faire un « aller » pour s’entrainer au Yémen, de faire un « retour » pour faire acter sa réinsertion post-traumatique par l’Etat français.
Il ne tue des français qu’après avoir rempli ces formalités.

8)- Réponses par élimination
Les exemples vus plus haut indiquent que les raisons de l’échec des Services français dans la surveillance des jihadistes en situation de « retour », ne peuvent être :

a- Un défaut de communication entre les Services français et occidentaux.
Les Services avaient les informations ou bien ils ont eu tout le loisir de les demander.

b- Une carence financière.
Ces criminels ont rencontré des Services qui avaient tous les moyens de les suivre et de les recevoir.
M. Chérif n’a pas quitté le tribunal par manque de greffiers mais simplement parcequ’il était en liberté provisoire.
M. Merah n’a pas quitté le bureau de son inspecteur traitant par manque de personnel de Garde-à-vue mais simplement parcequ’il a été déclaré libre à la fin de l’entretien.
M. Kouachi Saïd n’est pas sorti des procédures d’écoutes téléphoniques par défaut d’opérateurs.
Il a été dispensé d’écoutes pour cause de déradicalisation.

c- Une remarque
Il est à noter qu’un homme d’Etat comme M. Sarkozy, et il n’est surement pas le seul, est écouté jusqu’à ce que les agents de l’Etat trouvent quelque chose pour le convoquer.



d- Un déficit de lois.
- Personne n’a contraint l’Etat français d’exfiltrer M. Chérif, de Syrie vers la France, au lieu de signaler sa présence à l’Etat syrien pour qu’il le remette à l’Etat irakien.
Ça coutait une communication téléphonique. A l’époque, les Services pouvaient payer.
- M. Merah s’était entrainé aux armes en vue de tuer en France. La police pouvait le savoir, la justice pouvait le lui reprocher.
- M. Kouachi Saïd est revenu en France parcequ’il avait fini son entrainement. L’Etat français le savait. Ce fut considéré comme légal.

e- Une discrimination quelconque.
Le Coran n’est pas une révolte pour ces gens. C’est un choix d’adulte, une adhésion libre.
Leurs parcours les abstraient de tout ce qu’ils ont vécu antérieurement.
La seule discrimination qu’ils aient retenue est de vivre dans une société qui ne se subordonne pas au Coran.

9)- Réponse positive
Les fautes de l’Etat ne peuvent être attribuées aux conditions matérielles de son action.

Ces fautes ne peuvent découler que de la politique judiciaire.

10)- L’occultation judiciaire
Le parcours jihadistes comporte trois zones criminalisables : le départ, l’aller, le retour.

La séparation de la criminalité dans le pays « d’aller », le « pays source du Califat », et de la criminalité dans le pays de « retour », le pays de nationalité, participe directement à la mort des victimes de MM Merah, Chérif, Kouachi.

Un des intérêts de l’affaire Chérif est de mettre en évidence que la criminalisation du « départ » ne répond pas à la question posée.

En effet, M. Chérif est précisément jugé pour ses préparatifs collectifs de « départ ».
Donc, à aucun moment, les magistrats ne font le lien avec la criminalité de « l’Aller ». à ce point que les magistrats placent M. Chérif en liberté provisoire.

L’Etat dans son ensemble n’établit pas de lien entre ces deux criminalités puisqu’il soustrait M. Chérif à la justice syrienne et donc irakienne.

On ne peut pas être plus méprisant à l’égard des Etats parasités par l’idéologie du « Califat ».

Il n’est donc pas possible de dire que la criminalisation du « départ » ou du « retour » ont pour objet de maitriser la criminalité de « l’aller ».

Au contraire, ces criminalisations sont faites pour effacer, dénier, cette troisième.

11)- Le programme
Les cadres français ne maitrisent pas le parcours jihadiste, ils en dénient l’existence même, ils inventent à cette fin un programme du jihad à leur convenance.

Au fond, ils ne comprennent pas le jihad. Ils ne parviennent pas à croire, seulement croire, que ces gens-là puissent avoir une pensée politique et soient des stratèges.

1- L’aveuglement
Les cadres européens inventent un programme du jihad car ils veulent imposer une hiérarchie administrative et intellectuelle entre les occidentaux et les Etats occupés par les jihadistes.

Or, c’est une faute majeure que de ramener le jihadisme à une succession de crimes plus violents que d’ordinaire, parceque provenant d’une société moins développée que la société européenne.

Le vocabulaire de la « barbarie » et ses déclinaisons en « horreurs » peuvent flatter l’égo des cadres européens mais ils ne peuvent pas être les concepts d’une analyse rationnelle.

2- L’enjeu
Un commissaire de police de la DST, en fonction lors des attentats de 1995 perpétrés par le GIA, rappelle les paroles d’un des chefs des attentats :
- « Nous reviendrons indéfiniment jusqu’à ce que l’Europe soit musulmane ; vos femmes seront toutes voilées. »

Au mieux, les cadres européens haussent les épaules. Certains y voient une possibilité d’en finir avec les références laïques et révolutionnaires de la France.

De 1995 à 2016, le but de jihadistes est resté le même et Daesh ne fait que lui donner un espace victorieux.

Leur but est d’installer le califat autrement dit :
a- La dictature de l’islam ;
b- La suppression des Etats politiques, et à ce seul titre, comme unique source de légalité ;
c- Le remplacement des Etats politiques par la Charia, ou politique administrative religieuse ;
d- L’infériorité des femmes ;
e- L’installation d’une économie fondée sur l’esclavage.

Plus personne ne peut ignorer que le jihad vise à établir le califat et que celui-ci se constitue précisément par les allers-retours, les vas-et-viens des jihadistes.

3- La sanctuarisation
Il s’en suit qu’il est irresponsable et criminel d’aborder le jihad à partir de l’idéologie de la sanctuarisation de la France.

Exemple :
1- La criminalité de M. Kouachi, au Yémen, où il s’est entrainé à la guerre, est identique à celle qu’il a mise en œuvre en France.
2- L’une est constitutive de l’autre.
3- Dans tous les cas, l’objet de l’action est de détruire non pas tel ou tel Etat, mais la forme étatique elle-même.



Chapitre 2 : La doctrine à venir

12)- La visée judiciaire
Comment imaginer contrôler le terrorisme, le phénomène « Daesh », sans organiser l’action judiciaire à partir de l’obligation pour les jihadistes de reconnaitre les Etats, tous les Etats, sur les sols desquels ils vont officier volontairement, en réunion, pour préparer la dissolution violente de ces Etats ?

Exemple :
a- M. Merah profite de la faiblesse d’un Etat pour contribuer, même à une dose infinitésimale, à l’affaiblir. Puis il s’enfuit.
b- Il organise son « retour » pour mettre en œuvre la force que lui a donnée sa participation à cette parasitose criminelle.
c- Il profite du nombrilisme des cadres de l’Etat français pour transformer, avec son inspecteur traitant, ses crimes contre l’Etat pakistanais en rigolade de commissariat et son parcours jihadiste en récit de voyage formateur de la jeunesse.
d- Puis, il tue.
e- MM. Chérif, Kouachi et d’autres ne procèdent pas autrement.
f- Ces messieurs tuent, d’autres s’inscrivent en « relais », « réseaux », d’autres palabres.

13)- Juger ou tuer

1- L’absence de jugement
A partir du moment où l’Etat français refusait de qualifier la criminalité du séjour de M. Kouachi Saïd au Yémen, il ne pouvait concevoir la criminalité de son retour en France.

Il en va de même pour M. Merah et le Pakistan, M. Chérif et la Syrie et l’Irak.

Pour bien juger de la criminalité qu’ils voulaient installer en France, en l’espèce pour la prévoir, il eut fallu être capable de juger la criminalité qu’ils avaient installée dans les pays de « l’aller ».  

Faute d’en avoir eu le concept, l’Etat français ne peut que les tuer, soit en France par la mitraille, soit dans les « pays sources du Califat » par les drones.
2- Des leçons bizarres
C’est un peu court comme réponse pour des gens qui prétendent ne pas s’occuper des crimes commis au Yémen, en Irak, au Pakistan, en Syrie, en raison de la distance qui sépare un Etat de droit d’une dictature.

3- Le lieu de jugement
La criminalité yéménite de M. Kouachi Saïd ne peut se juger qu’au Yémen.

En effet, le fondement de sa criminalité n’est pas les actes qu’il y a commis. C’est le refus de reconnaitre la légitimité de cet Etat.

C’est le premier combat des jihadistes. Aller dans des Etats qu’ils pensent vulnérables pour organiser la parasitose du Califat.

C’est le premier acte judiciaire à leur égard. Les contraindre à répondre devant les tribunaux des Etats sur le territoire desquels ils se sont rendus volontairement pour les détruire.

14)- Les fautes européennes

1- Une alliance de fait
L’effet juridique et politique immédiat du refus de reconnaitre la justice des Etats parasités par les jihadistes est la justification occidentale de la disqualification par Daesh de ces Etats :
a- Pour Daesh, ces Etats sont dits criminels et sans légalité car non islamiques, ou pas assez.
b- Pour les Etats occidentaux, ces Etats sont dits criminels en raison de leur propre criminalité.
c- Dans les deux cas, leurs justices sont tenues pour incompétentes.

2- Un mépris aveuglant
Pour l’instant, la France, les pays européens, servent de base de repli à leurs ressortissants jihadistes.

Parcequ’ils sont français, ils disposent d’un lieu de sauvegarde qui leur permet de détruire un Etat sans en répondre devant la justice du susdit.

La France, les Etats européens, doivent acter que c’est cette protection qu’ils accordent à leurs jihadistes pour leurs crimes de « l’aller » qui garantit l’exécution de la criminalité du « retour » de ces mêmes jihadistes.

3- La subversion du droit
La doctrine légitime de l’Etat français est qu’il ne livre pas ses ressortissants à une justice étrangère. C’est le cas de nombreux Etats.

Cette doctrine est utilisée, manipulée, subvertie, par les jihadistes :
a- Ils prennent des forces dans un pays en combattant son Etat ; comme M. Kouachi au Yémen.
b- Puis, ils reviennent en France, presqu’en toute impunité, préparer la destruction de l’Etat qui leur sert si sottement de couverture.
c- Il faut être irresponsable pour imaginer que les jihadistes revenants ne sont actifs que par la pose de bombes.
d- Les uns posent des bombes, les autres posent des réseaux, les troisièmes posent des réformes institutionnelles.

4- Un humanisme criminel
L’argument de l’incapacité des Etats parasités à fournir les garanties humanistes de procès et d’exécution des peines qu’exigent les européens devient obsolète et même suspect à partir du moment où il sert de levier et de garantie à la commission de la criminalité visée.

Cet humanisme à sens unique fait oublier que ces criminels ont volontairement quitté un pays qui leur garantit une vie décente pour se rendre dans un autre qui ne leur a rien fait à seul fin de le détruire.

5- La Convention
Rien n’empêche les justices concernées de signer des conventions précisant les termes des relations judiciaires.






15)- Le vide juridique

1- La reconnaissance du fait juridique
En tuant par le truchement de drones des jihadistes français menant la guerre dans un Etat souverain, l’Etat français reconnait que la justice française ne suffit pas à tout.

Elle crée par conséquent l’espace d’un vide juridique.

2- Le passage au droit
Au lieu de ne viser qu’à les tuer, il faut placer les jihadistes devant leurs responsabilités vis-à-vis des Etats où ils vont puiser leurs capacités politiques et militaires à détruire tous les Etats au profit du Califat.

16)- La proposition

1- Le principe légal
Il est dit publiquement que le pilier de la réponse de l’Etat français au terrorisme est la qualification « d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste ».

La grande force de cette qualification tient en sa capacité à judiciariser la présomption de certains faits criminels, le tout étant défini par la loi. Cf. le texte ci-joint.

2- L’accord
Je propose que le gouvernement français partage cette qualification avec les justices des Etats agressés par les partisans du Califat.

Elles disposeront ainsi du socle juridique permettant à la justice de chacun de ces Etats souverains de juger les crimes terroristes commis par des français sur leur sol.

Il est inadmissible que les jihadistes reconnus tels par les tribunaux puissent revenir en France, s’y réinstaller, sans le quitus de la justice de l’Etat qu’ils ont agressé.

3- L’intitulé
La base de cet accord doit donc être la qualification « d’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » pour la présomption de faits criminels commis par des ressortissants français à l’étranger dans les circonstances du terrorisme.

4- La procédure
a- Chaque jihadiste doit savoir qu’à son « retour », le constat de son « aller » ayant eu lieu par la justice, il sera remis de droit à la justice de l’Etat qu’il a voulu détruire en lui imposant le Califat.  

b- Le fait doit être prioritaire car la criminalité de « l’aller » a précédé et conditionné l’éventuelle criminalité du « retour ». Les cas contraires (ex. : minorité du sujet) doivent être dûment inscrits dans les textes légaux.

5- La convention
L’Etat français doit examiner avec les Etats concernés les conditions loyales et humaines de l’action judiciaire et de ses suites. Il fournit l’aide juridique ordinaire.

6- La reconnaissance des justices
Pour ce qui est de la Syrie, je rappelle que M. Fabius, Ministre des affaires étrangères, a dit que la France reconnaissait l’armée de l’Etat syrien, donc l’Etat.

La reconnaissance de la justice syrienne n’est plus un problème politique.

17)- La légitimation de Daesh
La première mesure de combat contre les jihadistes du Califat est de les contraindre à reconnaitre les Etats dont ils foulent la souveraineté.

En effet, la logique interne de Daesh est de substituer le droit religieux comme fondement d’une administration conquérante au droit laïque des Etats modernes.

La laïcité du droit se fonde sur la référence du droit à des principes tirés du fonctionnement de la société, et non à des principes tirés du divin.

Cet affrontement de deux politiques juridiques se crée d’abord dans les Etats qui ont inscrit une religion spécifique comme composante de leur politique administrative appelée pompeusement Constitution.

Cette religion est précisément celle dont Daesh veut imposer les règles juridiques comme normes officielles.

Retirer à ces Etats la capacité de juger par leurs instances judiciaires laïques ceux qui violent l’ordre public sur leur territoire, revient à légitimer l’opération de disqualification du droit laïc au profit du droit religieux, déjà placés officiellement côte à côte par les régimes en place.

18)- L’illusion
Les Etats européens, dont la France, s’imaginent extérieurs à ce débat parceque :
a- ils ont séparé la politique administrative de l’Etat de celle de la religion,
b- celle-ci a des fonctions civiles et non étatiques,
d- la religion de référence sur leur sol est distincte de celle à laquelle se réfère Daesh.

C’est une illusion dont nous pouvons déjà voir les premières conséquences.

Une fois qu’il aurait été acté que le droit religieux est considéré comme source de légalité par les Etats européens :
a- il deviendrait secondaire aux yeux des jihadistes que la religion de référence soit telle ou telle ;
b- c’est le droit religieux qui serait présenté comme affrontant le droit laïc.
c- il en découlera nécessairement la mise en concurrence du droit religieux et du droit laïque dans les Etats européens.
d- cette mise en concurrence est déjà à l’œuvre à la marge dans toutes les institutions françaises (écoles, entreprises, lieux culturels, hôpitaux, etc.).
e- la justice française multiplie les jugements mettant la charia à égalité avec le droit civil, ou en étant une source.
f- les politiciens et universitaires fondamentalistes ne se privent pas de relayer les attentats de janvier et novembre pour demander la suppression de la loi 1905.



19)- L’accommodement
Par conséquent, on ne peut combattre efficacement Daesh qu’en contraignant ses partisans français, ayant sévi dans les Etats où la référence religieuse de Daesh fait foi, à rendre compte à la justice civile de l’Etat concerné.

Permettre à ces criminels de choisir leur justice civile, celle de France ou celle du lieu d’exercice de leur criminalité, au prétexte d’une disqualification morale de l’Etat en question, revient à :
1- reconnaitre la légitimité de leur criminalité dans les « Etats sources du Califat »
2- déclarer que seule la prolongation de cette criminalité en Europe, en l’espèce en France, est illégale.

C’est la mondialisation de la politique dite de « l’accommodement ».

Dans ces conditions, inévitablement, la criminalité jihadiste tend à se voir justifier aussi en Europe.

A ce titre, on peut remarquer une multiplication des commentaires invoquant le martyr que subiraient en Europe les populations susceptibles d’être jihadistes comme étant une cause de celui-ci.

Le débat ouvert par M. le Premier Ministre au sujet de l’idéologie de l’explication conduisant à l’excuse, la vigueur de la controverse, indiquent la profondeur des légitimations du jihad en France.

20)- L’engagement du débat
Chacun sait que le débat a déjà commencé.

La violence de l’affrontement entre M. le Premier Ministre et M. le Président de l’Observatoire de la laïcité est le coup de sifflet d’un départ.

Il a été maintes fois souligné que ce sont des français qui commettent les attentats.

On ne peut remarquer ce fait et présenter en même temps ces attentats comme une « barbarie » extérieure à la société française.
Ces attentats sont en effet la filiale française du combat politique entre l’administration laïque et l’administration religieuse.

Ces attentats sont un dispositif politique visant à modifier par la force la politique administrative, ou Constitutionnelle, de la France. 

Les auteurs des attentats ne sont pas, ne sont plus, des étrangers qui viennent en France, en Europe, apporter la parole sanglante de l’islamisme.

Ce sont des français qui vont dans les pays où se mène au grand jour le combat entre l’administration laïque (l’Etat) et l’administration religieuse (la charia).

Ils y vont pour apprendre à mener ce combat en France, en Europe.

Forts de la doctrine de la France :
a- de la disqualification des Etats « sources du Califat » ;
b- du bien-fondé du combat des jihadistes contre ces régimes ;
c- de la disqualification des justices de ces Etats ;
d- du retour à la virginité idéologique, voire judiciaire, des jihadistes, quand ils reviennent en France, en Europe ;
d- ils savent que leurs initiatives, qu’elles soient politiques ou sanglantes, auront des effets réorganisateurs quant à la fragilisation de l’Etat, à son recul, à l’installation de la charia.

A partir du moment où les Etats européens refusent d’identifier la criminalité des jihadistes au Yémen à la criminalité qu’ils mènent en France, et vice-versa, c’est qu’ils estiment avoir quelque chose à tirer :
a- de l’exercice de ce combat dans les pays du « califat » ;
b- de la duplication de ce combat en France, en Europe.

22)- Le devenir de la démocratie

1- Soit, les démocraties européennes abandonnent les populations extérieures à leur civilisation à l’archaïsme de la primauté du droit religieux, sous des prétextes droit-de-l’hommistes malhonnêtes.

Dans ce cas, il est inutile de faire semblant et d’envoyer des soldats se faire tuer juste pour couvrir l’hypocrisie et la lâcheté des cadres dirigeants européens.

Il se pourrait alors qu’à brève échéance, la courageuse initiative des policiers de la Brigade anticriminalité (BAC) au Bataclan ait été vaine et devienne illégale.

2- Soit, elles font front avec les Etats qui surnagent dans cette tempête et elles collaborent avec des magistratures qui ne demandent qu’à parler à leurs alter-egos.

A partir de ce moment, le droit dispose de la force et la force accompagne le droit.

23)- Conclusion
C’est devant le public que doivent s’exprimer ceux qui refusent d’envisager l’établissement de règles de droit interétatiques permettant aux démocraties européennes de mettre à la disposition des justices des Etats émergeants les criminels qui entretiennent la guerre sur le territoire pour la seule fin de détruire jusqu’à la possibilité de la démocratie.

Ils doivent dire qu’il aurait été inhumain de livrer M. Kouachi à la justice yéménite, à son retour du Yémen, parceque celle-ci n’est pas assez humaniste à leur goût et qu’il est inutile de discuter avec elle.

Les criminels doivent être arrêtés par des moyens militaires. Leurs crimes doivent être jugés par des moyens judiciaires. La justice qualifiée est celle de l’Etat parasité par le crime.

Les criminels du jihad doivent savoir que les Etats se concertent pour établir une légalité judiciaire active.


Marc SALOMONE




PS : Je joins :
a- Le texte de la loi sur le délit d’association de malfaiteurs
b- La lettre écrite au Ministère de la justice du Maroc.


1- Le texte de la « Délimitation précise du délit d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste »

Délimitation précise du délit d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste

12e législature

Question écrite n° 13584 de M. Jean Louis Masson (Moselle - NI)

Publiée dans le JO Sénat du 26/08/2004 - page 1893

M. Jean-Louis Masson attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le fait que le délit " d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste " est relativement imprécis. Son application peut conduire à des décisions arbitraires ne reposant sur aucun élément concret. En 1999, dans un rapport sur la législation antiterroriste en France, la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) a d'ailleurs demandé l'abrogation de la loi de 1996. Elle s'est fait l'écho de l'opinion de nombreux avocats en estimant qu'il y avait un risque d'extension arbitraire d'un champ d'application des procédures et du nombre des personnes inculpées " sans aucune présomption de commission - d'actes terroristes - au sens exact du terme ". En fait, trop souvent, l'application qui est faite de ce délit conduit, selon la FIDH, à des conclusions juridiques reposant " sur un maximum de spéculations, de déductions et d'insinuations ". Dans le climat d'hystérie sécuritaire qui règne actuellement à l'encontre des intégristes musulmans, ce constat est plus vrai que jamais. Il souhaiterait donc qu'il lui indique s'il ne pense pas qu'il conviendrait de mieux préciser le délit susvisé, ainsi que ses conditions d'application et de limiter également les possibilités d'arbitraire dans la mise en détention provisoire des personnes concernées.

Réponse du Ministère de la justice

Publiée dans le JO Sénat du 17/02/2005 - page 488

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire savoir à l'honorable parlementaire que le délit d'association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme est prévu par l'article 421-2-1 du code pénal qui dispose que constitue un acte de terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un des actes de terrorisme mentionnés aux articles 421-1 et 421-2 du code pénal. Ce délit est donc tout d'abord circonscrit à une certaine catégorie d'infractions limitativement énumérées dans les articles précités et doit être caractérisé, pour être constitué contre une personne, par son appartenance démontrée à un groupe qualifié de terroriste et par la mise en place de moyens logistiques, humains, financiers, d'actes préparatoires permettant ou facilitant la planification, la préparation ou la réalisation de projets terroristes éventuels, ce qui limite son champ d'application. En outre, cette incrimination, instaurée dans le code pénal par la loi du 22 juillet 1996, est la reprise, dans le champ du terrorisme, du délit d'association de malfaiteurs de droit commun de l'article 450-1 de ce même code. Le garde des sceaux assure de même l'honorable parlementaire que, dans ces dossiers qui font l'objet d'un suivi attentif de la part de ses services, l'application du délit d'association de malfaiteurs par les juridictions spécialisées se fait avec la plus grande rigueur et sur le fondement de faits précis et circonstanciés. Toute décision tendant à utiliser cette incrimination puis à placer en détention provisoire une personne ne saurait enfin être qualifiée d'arbitraire puisqu'elle est nécessairement prise par une juridiction indépendante et susceptible de contestation par le mécanisme des voies de recours. Enfin, le garde des sceaux rappelle à l'honorable parlementaire que la lutte contre le terrorisme est une priorité nationale et qu'il convient, pour ce faire, de se doter de moyens répressifs efficaces reposant en particulier sur le démantèlement très en amont des groupes criminels avant même la commission ou la tentative de commission d'attentat, au lieu de se concentrer sur des individus ou des actes isolés. C'est grâce à ce type de moyens associés au respect des droits de la défense et du procès équitable que le modèle judiciaire français de lutte contre le terrorisme reste aujourd'hui incontesté, sur la scène européenne et internationale.

2)- La lettre écrite au Ministère de la justice du Maroc.

Le mercredi 20 janvier 2016

Copie à :
M. le Président de la République
M. le Premier Ministre
Mme la Garde des Sceaux
Pour le Ministère de la justice marocain

1)- Préambule
J’ai l’honneur de venir vers vous afin de vous soumettre une réflexion quant aux conséquences de l’arrestation du terroriste belgo-marocain, Gelel Attar.

La presse nous dit : « Les trois Belges ont évolué au sein des mêmes structures syriennes. Abaaoud et Akrouh sont morts tous les deux dans l'assaut de Saint-Denis, après avoir semé la terreur dans les rues de Paris. » 

Le Maroc n’est donc qu’un moment du parcours de ce criminel.
C’est en Syrie que ce criminel a organisé sa formation et son action visant à la suppression de tout Etat. Pour l’Etat syrien, le crime est constitué du seul fait de se livrer à une activité militaire illégale sur son sol.

L’Etat syrien n’est pas le seul visé, mais c’est lui qui a été attaqué en premier lieu et en vue de fonder une action. Les autres Etats, dont le Maroc, sont des étapes d’un parcours visant à étendre cette politique nihiliste de substitution d’une administration religieuse à l’Etat.

La question judiciaire qui se pose est de savoir si les justices des Etats constitués doivent :
1- Se laisser manipuler par ces criminels qui veulent tous les détruire ;
2- Prendre l’initiative d’organiser l’ordre des priorités et de charger leurs justices de dire le droit.

La question va se poser à l’Etat marocain dans cette affaire judiciaire puisque selon des sources policières : « Les enquêteurs n'ont pas la certitude qu'il a participé aux attentats ». La criminalité proprement pénale n’est donc pas marocaine.

Soit, la justice marocaine s’en tient au dossier et elle condamnera le jihadiste pour ses seules fréquentations ;
Soit, elle extrapole et elle le condamnera pour des motifs politiques.
Dans les deux cas, elle aura été manipulée par Daesh.


2)- Détour par l’exemple français
Aux seules fins d’illustrer ma réflexion, je fais un détour par l’idéologie publique française en matière de combat contre le terrorisme jihadiste.
Ainsi, en France, un Commissaire de police a rappelé à la télévision, le 7 janvier 2016, la doctrine de l’administration française :
- « On ne peut leur reprocher le simple fait d’être allé en Syrie ». Tout est dit.

Il s’en suit, trois exemples :
1- Mohamed Merah
M. Merah est allé agresser l’Etat du Yémen puis est revenu pour raconter ses fabuleux voyages à son inspecteur traitant ; l’Etat français.
Puis, libre, il a assassiné 7 français, dont trois enfants.

2- Peter Cherif
Pour son confort et à sa demande ; M. Cherif a été exfiltré de Syrie par les Services français. Il y organisait le jihad des français après s’être évadé d’une prison où la justice irakienne l’avait placé pour 15 ans.

Laissé en liberté durant son procès pour des faits français, il s’est sauvé le jour du verdict. Il est actuellement un tueur jihadiste libre.

3- Saïd Kouachi
Wikipédia :
« En 2011, Saïd reçoit un entraînement au combat et au maniement d'armes légères au Yémen
Il était inscrit sur la liste noire des terroristes aux États-Unis depuis quelques années. Repéré à cause de son voyage au Yémen via le Sultanat d'Oman, il fait l'objet entre 2011 et 2014, de quinze mois d’écoutes et de quatre mois de surveillance physique. La CNCIS met fin aux écoutes téléphoniques en juin 2014 faute d’éléments probants en lien avec le terrorisme, les écoutes ayant uniquement révélé des allusions à un trafic de contrefaçons de vêtements et de chaussures de sport.
En 2012, il se marie à Charleville-Mézières où son frère s'était marié en 2008 »
Libre, M. Kouachi a participé à l’assassinat de 17 personnes.

4- En novembre 2014, l'association ILERI-défense, animée par des étudiants de l'Institut d'Etudes des Relations Internationales (ILERI), comptait 184 jihadistes de retour en France.
Ils étaient tous libres ; la justice française étant incompétente pour juger les faits de Syrie et refusant de les conduire devant la justice syrienne jugée inférieure.
La cohésion idéologique de cette association de cadres supérieurs à l’égard du combat contre le jihadisme est assurée par la fable habituelle : « la France bénéficie d'un maillage du territoire que beaucoup nous envient : la gendarmerie dans les campagnes, la police dans les villes et les douanes partout sur l'ensemble du pays. »

5- Certes, après 2015, la magistrature française juge des faits commis en Syrie. Mais lesquels, combien, de quel droit ?

3)- Le contournement du droit
Pour corriger les failles de leur politique de sécurité, les Etats occidentaux, dont la France, tuent leurs propres ressortissants jihadistes en Syrie.

Or, telle qu’elle s’organise, cette pratique des « exécutions extrajudiciaires », dont le Président Obama se vantait il y a encore peu, ne pourra pas durer.

En effet, elle n’est pas d’abord un moyen de guerre, mais d’abord un substitue au droit.

En effet, elle vient d’abord en substitution à l’examen de la prééminence des Etats concernés quant à la qualification de la présence de ces criminels sur leurs sols.

Daesh rendra insupportable la propension des Etats occidentaux à faire un tri parmi les Etats, à les labelliser ou à les exclure, selon leur convenance.

4)- Le retour du droit
Sachant que Daesh n’est pas un affrontement entre les Etats mais entre le chaos et l’ordre, les Etats et le nihilisme, il est possible de restaurer l’autorité des Etats et d’y subordonner les jihadistes.

Une partie notable de ce travail consiste à imposer au criminel concerné la reconnaissance officielle, de visu, de la légitimité de l’Etat qu’il a offensé en premier lieu et le plus directement.

Cela ne peut se faire qu’en lui imposant de faire face aux magistrats de l’Etat qu’il a voulu détruire comme préalable à la destruction de tous les autres.
Les Etats de nationalité des jihadistes créeraient ainsi une jurisprudence salutaire en déclarant qu’ils ne peuvent pas connaitre judiciairement les tords faits à leurs Etats avant que la justice du pays ayant subi l’agression fondatrice leur ait assuré que le criminel concerné n’avait plus de comptes à lui rendre.

C'est-à-dire après qu’il lui ait fait face, qu’elle l’ait jugé et lui en ait donné quitus.

Ainsi :
a- M. Merah et M. Kouachi auraient été remis à la justice yéménite, M. Chérif aurait été reconduit à la prison irakienne.
b- Les 184 jihadistes connus des services de l’Etat français en 2014 seraient repartis rendre compte aux justices des Etats qu’ils avaient tenté de détruire. 
c- Ensuite seulement, ils se seraient présentés aux instances régulières des Pouvoirs publics français.

Rien n’empêche que :
a- Les Etats se serve de cette guerre contre les Etats pour mettre à jour leurs protocoles judiciaires et pénitentiaires ;
b- Les justices définissent les personnes aptes à être jugées.
c- Les Etats de nationalité assistent leurs ressortissants durant les procès.

En tout état de cause les imperfections des Pouvoirs publics d’un Etat ne peuvent pas justifier que des criminels de guerre soient soustraient à la seule justice habilitée à juger des modalités de leurs participations à la destruction de tout ordre public susceptible d’évolutions démocratiques ; celui des Etats.

5)- La protection et le droit
1- Le droit
Les Etats ne faillissent pas à leurs engagements de protection à l’égard de leurs ressortissants en les contraignant à reconnaitre la légalité de la forme étatique. 
En effet, en contraignant cet homme à répondre devant la justice syrienne, la justice de nationalité du jihadiste, marocaine en l’espèce, lui ferait effectuer le seul parcours judiciaire propre à assurer la solidité des Etats comme unique forme d’organisation publique.
Ce parcours judiciaire ne passe pas par tous les Etat que ce criminel a traversés mais par ceux où il s’est livré à sa politique de destruction de la forme étatique.

Il est indispensable pour rendre compte juridiquement de la faute initiale et continue du criminel qu’il rencontre chaque justice dont il a voulu détruire l’Etat.

2- La protection
La protection des ressortissants est une saine mesure pour la criminalité ordinaire car il n’est pas bon qu’un homme n’ait nulle part où s’enfuir. Les Etats marocain, français, comme d’autres, assurent cette protection.

Par contre, la protection nationale des ressortissants devient abusive lorsqu’elle conforte le criminel dans sa certitude de pouvoir manipuler les Etats et de trouver des procédures complices en leurs seins.

Dans le cas du jihadisme, la protection de l’Etat de nationalité garantit l’impunité d’une activité dont le crime de guerre est un élément constitutif permanent et dont la visée est de se servir de cette protection pour prendre à l’étranger la force de détruire son propre Etat.

Ainsi :
1- M. Merah va s’entrainer au Yémen puis bénéficie de la protection de l’Etat français vis-à-vis de ses ressortissants. Cela lui permet de rentabiliser sa formation criminelle pour tuer des enfants. L’un ne va pas sans l’autre.

2- Les jihadistes vont en Syrie mettre en place leur criminalité puis s’en reviennent tisser les réseaux pacifiques du jihad.

3- Ils ne le font si aisément que parceque :
a- Ils bénéficient officiellement d’une base de repli fourni par leurs Etats de nationalité.
b- Ces Etats installent une inégalité de principe entres les magistratures de différentes Etats.
c- Il se forge ainsi une jurisprudence aux termes de laquelle la criminalité est réputée être partagée entre les Etats et les jihadistes. Ces derniers ne demandent pas autre chose ; ils s’occupent du reste.
Nous ne pouvons que souhaiter bonne chance aux services de sécurité.

6)- Bilan
Le Maroc ne peut échapper au piège qui lui est tendu par Daesh qu’en prenant langue avec la justice syrienne pour qu’elle juge ce criminel comme un acte préalable nécessaire à son jugement par la justice marocaine.

La jurisprudence ainsi créée serait soutenue par les populations qui en ont assez des sectarismes juridiques complices.

La plainte déposée contre la Belgique par la mère d’une victime du Bataclan indique que les populations n’acceptent plus que :

1- On leur prouve qu’il est contraire aux droits de l’homme que M. Merah rende des comptes à l’Etat yéménite où il a matériellement déjà participé à des organisations criminelles ; au prétexte que cet Etat n’est pas assez bien pour un français.

2- Les justices auxquelles ils se rendent :
a- Refusent de les remettre à la seule justice compétente pour juger les crimes déjà commis ;
b- Garantissent leur liberté au motif qu’ils n’ont pas commis de crime qui ressorte de leur compétence.

3- Les universitaires appellent cela « un avantage moral ».

7)- L’espace homogène
La criminalité jihadiste est une criminalité continue.

Ce n’est pas un aller-retour mais un parcours. C’est ce parcours qui constitue peu à peu l’espace politique djihadiste.

A la manière d’une toile d’araignée dont on ignore le commencement et la fin et qui ne peut se comprendre que dans son fonctionnement

La justice compétente n’est ni ici ni ailleurs, elle est là où la criminalité jihadiste voudrait imposer qu’elle ne soit pas.
La justice marocaine a la compétence de convoquer toutes les magistratures à comprendre que :
1- Un espace judiciaire homogène s’est formé sous les attaques de Daesh ;
2- Les criminels concernés doivent répondre devant les justices des Etats où ils ont forgé leur criminalité universelle.

8)- Conclusion
En transférant à la justice syrienne le soin de rendre le jugement préalable à son propre jugement ; la justice marocaine sera soutenue par les honnêtes gens.

En vous remerciant pour votre attention,

Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de mes salutations distinguées,


Marc SALOMONE

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